Critique d’Indianara (ACID, Cannes 2019), de Marcelo Barbosa et Aude Chevalier Beaumel.
Dans les rues de Rio de Janeiro ou dans le squat et refuge de la Casa Nem, nous suivons un corps « musée » (selon les termes de la réalisatrice), un corps vieilli, transformé par les hormones, marqué par l’histoire intime et la grande Histoire, un corps qui cristallise une vie de luttes et transcende les frontières – malgré son interdiction de revenir sur le territoire français pour présenter le film qui porte son nom. Indianara est un corps qui s’impose et s’expose pour nous obliger à voir la réalité sociale du Brésil, pour nous forcer à être les témoins de l’oppression des minorités, pour que les inégalités et la pourriture politiques nous éclate à la gueule sans que nous puissions détourner le regard. Indianara c’est un cri de résistance. Indianara c’est une force et un désarroi. Indianara c’est un esprit provocateur et un frisson d’effroi. Indianara est une « pute » qui donne le courage à toute une communauté de relever la tête mais qui s’effondre face à l’assassinat de Marielle Franco et l’élection de Bolsonaro. Indianara, c’est un palais en ruines, un film nécessaire, une claque dans l’hypocrisie bourgeoise des mamies cannoises.