Les perles de Clermont

Au début du mois de février, l’équipe de Good Time s’est rendue à l’édition 2020 du Festival de court-métrage de Clermont-Ferrand. Voici les trésors qu’elle a décelés en hors-compétition, à travers un éventail bigarré de sélections. Nous vous souhaitons une excellente lecture !

Labo : la puissance d’un dispositif

A chaque édition, la compétition Labo surprend par ses tours de force expérimentaux et son inventivité pleine d’audace. Il en va de même pour cette année : en appliquant rigoureusement un dispositif ingénieux, la plupart des cinéastes ont délivré des films toujours très percutants, peu importe le ton employé. En voici deux exemples très différents :

Mega Sexy Robot Dinosaur de Paul Howard Allen, Royaume-Uni/Pays de Galles, 2018
Tout est dans le titre.

Mega Sexy Robot Dinosaur prend un malin plaisir à contrer chacune de nos attentes. Ce petit film, auquel aucune étiquette ne peut adhérer, a été réalisé par Paul Howard Allen. Le cinéaste, non sans humour, se permet de creuser son propre film devant nos yeux, allant jusqu’à modifier le format de l’image ou remixer le son « en direct », le tout doublé d’un commentaire extra-lucide et jubilatoire. Cette modulation réflexive de son film permet d’abattre nos préjugés quant aux genres cinématographique et les démarches d’auteur.


California on Fire de James Frost, Etats-Unis, 2018
Prix du public 2020

Déni, colère, marchandage, tristesse et acceptation. Voici les 5 étapes du deuil théorisées dans les années 60 par la psychiatre Elisabeth Kübler-Ross. Le cinéaste Jeff Frost reprend cette structure à son compte pour chapitrer et narrer la prise en charge de l’incendie qui a ravagé la Californie en fin d’année 2018. Basique, le dispositif n’en reste pas moins redoutablement efficace : tous les plans sont des timelapses embrasés montrant les flammes consumer lentement, très lentement, le paysage et l’image. Ce procédé vient créer une collision entre deux rythmes très différents: celui du feu et celui de la population.

Cinéma polonais : la clémence de l’image

Nasza Klątwa de Tomasz Śliwiński, Pologne, 2013

Ce documentaire intime issu de la sélection polonaise aura retenu notre attention par l’émoi qu’il suscite. Le nouveau-né d’un jeune couple est atteint d’une maladie rare et incurable, le syndrome d’Ondine, caractérisé par des arrêts respiratoires pendant le sommeil : dès qu’il s’endort, l’enfant doit respirer à l’aide d’une machine placée par trachéotomie. Tomasz, le père, décide de filmer leur quotidien. Le court-métrage alterne entre des séquences sur le canapé où les parents expriment leurs doutes et leurs angoisses, et des scènes où ils s’occupent du bébé avec une attention toute particulière. Le film dépeint tout l’amour de ces jeunes parents à l’égard de leur enfant et s’avère profondément lumineux malgré la brutalité de ce syndrome terrifiant.

Les mondes paysans : un vent de fraîcheur

La sélection thématique de cette année était consacrée aux mondes paysans, souvent relayés au second plan au cinéma… Sauf pour la sphère du court-métrage, privilégiée pour représenter ce que l’on ne voit pas ailleurs. Ces films cousus de tendresse et d’humour ont apporté un véritable vent de fraîcheur sur le festival et permettent de dépoussiérer une imagerie bien trop souvent encrassée par les préjugés.

Le Skate Moderne d’Antoine Besse, France, 2014

Non, il ne s’agit pas d’un épisode de Peaky Blinders, mais d’un autre gang : une bande de skaters fermiers agissant dans les coins les plus reculés de la Dordogne. En croisant fiction et documentaire, le film suit ces skaters insoupçonnés avec beaucoup d’humour et met habilement en scène de multiples croisements : un sport urbain par excellence dans l’environnement le plus rural qui soit et un entrechoc de générations et de cultures, permettant de donner un autre regard sur ces « mondes ».

L’homme qui plantait des arbres de Frédéric Back, d’après la nouvelle de Jean Giono, Canada, 1987
Oscar du meilleur film d’animation
Prix spécial du Jury (Clermont-Ferrand, 1988)
Prix du public (Clermont-Ferrand, 1988)

Un festival, c’est aussi pour déterrer des trésors et rattraper le temps perdu. Rien de mieux pour clore cet article que ce merveilleux film, déjà âgé de 33 ans. Bijou d’animation, cette aquarelle en perpétuel mouvement dépeint la vie d’un homme solitaire qui, à lui seul, planta une immense forêt dans le sud de la France, gland par gland. La voix-over du film est assurée par un grand conteur s’il en est : Philippe Noiret. Ce film enchanteur aux multiples récompenses n’a pas vieilli d’un trait. Toutefois, son visionnage en 2020 laisse un arrière goût-doux amer tant l’espoir qu’il incarne se heurte à la crise écologique d’aujourd’hui.

En définitive, cette édition du festival de Clermont-Ferrand n’a pas fait exception et aura régalé nos pupilles. En espérant que cet écrémage non-exhaustif vous plaise, nous vous souhaitons un bon visionnage !

(Have a) Good Time.

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